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Avec deux ouvrages, le sociologue Antoine Idier nous plonge à la fin des années 70. Une époque où les homosexuels, tentent de se regrouper afin de faire entendre une parole et des revendications publiques.
– Les alinéas au placard. L’abrogation du délit d’homosexualité (1977-1982), Paris, Éditions Cartouche,
– Dissidanse rose. Fragments de vies homosexuelles à Lyon dans les années 1970, Lyon, Éditions Michel Chomarat.
Jusqu’à la fin des années 70, des régimes discriminatoires contre les homosexuels ont subsisté en France. Ainsi, l’alinéa 2 de l’article 331 du code pénal, abrogé depuis 1982, sanctionnait «quiconque aura commis un acte impudique ou contre-nature avec un mineur du même sexe». Le tout se référant à un acte sexuel sans violence. Pendant ce temps, l’acte hétérosexuel était autorisé à partir de la majorité sexuelle, quinze ans.
Une loi du député gaulliste Paul Mirguet datant de 1960, désignant les «fléaux sociaux», plaçait l’homosexualité au même rang que l’alcool et la prostitution. Le ministère de l’Intérieur, quant à lui, entretenait un fichier des clients des établissements réputés homosexuels.
En 1981-1982, à la suite de l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, disparaissent les dernières mesures réprimant l’homosexualité. La plus emblématique d’entre elles est la disparition – par une loi votée le 27 juillet 1982 et promulguée le 4 août – de l’article 331 alinéa 2 du code pénal qui créait un « délit d’homosexualité ». Mais ces changement législatifs font suite à une mobilisation de longue date : en novembre 1974, Valéry Giscard d’Estaing institue une Commission de révision du code pénal. À ce moment, intellectuels et philosophes, Michel Foucault par exemple, vont porter devant la commission. En 1977, des recommandations pour abaisser la majorité sexuelle et supprimer les mesures de discrimination qui existent, à ce sujet, à l’encontre des pratiques homosexuelles. Là où le mineur est présumé non-consentant et l’homosexuel réputé coupable de subornation, Michel Foucault propose que cette circonstance soit laissée à l’appréciation du juge et que «la liberté de l’un et l’autre des partenaires à une relation sexuelle est la base nécessaire et suffisante de la licéité de cette relation». A cette époque, des philosophes réfléchissent au statut de l’enfance, et se demandent à partir de quel moment on admet que l’enfant peut exprimer un consentement et que les adultes n’ont plus à se mêler des relations sexuelles ou amoureuses qu’il peut lier avec des enfants ou des adultes. La question de l’âge du consentement est portée par un petit groupe d’intellectuels mais les revendications disparaissent car les mouvements gays ne souhaitent pas s’en emparer. Ils ont conscience que c’est une arme à double tranchant, car « pédophile » est une des insultes qu’on leur oppose… Ainsi l’ouvrage d’Antoine Idier nous apprend qu’au milieu des années 70, certains sujets, aujourd’hui complètement tabou avaient le mérite d’être abordés, discutés, débattus… ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.
Aurait-on gagné des droits (puisqu’il est bien clair que les droits des homosexuels _mariage, adoption, PMA_constituent, pour tous, un droit à vivre dans une société un peu moins discriminante), mais perdu en liberté de penser et d’expression ? Lire la suite et partager