Livres, Radio : émissions 2014

Et si le parlement européen exerçait son (contre) pouvoir ?

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parlementHélène Michel, Louis Weber et Bernard Cassen* viennent d’écrire un petit livre fort utile pour décrypter les enjeux des dernières élections européennes.Dans cet ouvrage, Le Parlement européen, pour faire quoi ? (éditions du Croquant),
on apprend notamment que, contrairement à certaines rumeurs habillement et abondamment répandues, le rôle et les pouvoirs du  Parlement européen,  élu au suffrage universel direct dans les États membres de l’Union européenne (UE) depuis 1979 , sont  loin d’être négligeables et n’ont cessé d’augmenter, renforcés par les différents traités successifs,y compris celui, contesté, de Lisbonne. L’utile description du fonctionnement de cette assemblée où la recherche permanente du consensus et le partage des postes entre les deux groupes politiques dominants – conservateur et social-démocrate – conduisent le plus souvent à donner aux décisions un caractère « évident » et non politique. Or, derrière le rideau de fumée que constituent les avis des experts multiples et variés et la l’extrême complexité des procédures avant le vote, les directives adoptée sont souvent  issues des judicieux « conseils » gracieusement offerts par les lobbies qui défendent à grand frais les intérêts des multinationales. Ces groupes de pressions sont institutionnels à Bruxelles. Muni du coupe fil adéquat, le lobbyiste peut assister acouv_3036ux réunions des commissions parlementaires et à celles des groupes politiques. 4200 d’entre eux sont accrédités (contre 762 députés européens et 2000 assistants parlementaires). Tout aussi institutionnelle est la Cour de justice de l’Union européenne qui produit le droit et dont la jurisprudence défend systématiquement les intérêts des entreprises dans la perspective du capitalisme financier. Les interdire redonnerait de la liberté (et du travail !) aux parlementaires européens….

Par ailleurs, les auteurs soulignent le fait que la majorité députés européens a voté des dispositions qui leur lient les mains ! Sans le moindre débat démocratique, à l’intérieur des pays, ou même dans les instances européennes, ils ont adopté les différents « pack »** et autres Pacte de stabilité ou encore  Pacte budgétaire européen, inscrivant ainsi dans le marbre le dogme de l’ultralibéralisme et des restrictions budgétaires menant à l’affaiblissement des secteurs publics, et la déréglementation du marché du travail. Ainsi, depuis la fin de l’Union soviétique, l’UE est le seul endroit au monde où des principes économiques dogmatiques sont institutionnalisés !

Ces règles présentées comme « techniques » sont donc hautement politiques et vise tout simplement au pillage des richesses collectives issues du travail par une oligarchie de banquiers et de financiers. C’est pourquoi les auteurs plaident pour une refondation démocratique de la construction européenne dans laquelle les pouvoirs du Parlement européen s’articuleraient avec ceux des parlements nationaux et avec les forces politiques ancrées dans les sociétés des États membres. Une telle démarche implique une rupture radicale avec le carcan néolibéral des traités actuels et avec les partis politiques qui s’en accommodent.

*Bernard Cassen est professeur émérite de l’Institut d’études européennes de l’université Paris 8 et secrétaire général de l’association Mémoire des luttes.
Hélène Michel est professeure de science politique à l’université de Strasbourg, membre du comité éditorial de la collection et de la revue Savoir/agir.
Louis Weber coordonne la rédaction de la revue Savoir/agir et participe aux activités d’Espaces Marx et de la Fondation Copernic.

**Avec le Traité sur la stabilisation, la coordination et la gouvernance » (TSCG) et la règle du Two Pack qui vise à coordonner, toujours dans la même direction libérale, les politiques économiques, l’Union européenne est devenu un « système de surveillance » des États membres. L’Allemagne de Merkel a imposé ses desiderata. Ainsi, alors que le traité de Maastricht posait que les questions de salaires, les conventions collectives étaient l’apanage des États membres, avec le TSCG, cela devient – illégalement – du ressort de la Commission. Cette nouvelle règle européenne doit être, on le sait, inscrite dans les constitutions des pays.

 

 

 

 


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