Chroniques de Vincent Turban, Radio : émissions 2013

Fela Anikulapo Kuti : un artiste de combat(s) !

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fela-kuti Né à Abeokuta le 15 octobre 1938, le musicien Fela Kuti s’est engagé dans un combat contre la corruption, l’oppression dont le peuple nigérian est victime depuis des années.

Considéré comme l’inventeur de l’afro beat (savant mélange de jazz, de musique yoruba et de funk), genre musical considéré comme le plus rebelle du continent africain, Fela critique l’establishment et dénonce ouvertement  dans de violentes diatribes les maux dont sont atteints son pays  ainsi que le continent africain.

Malheureusement, pour le faire taire, la junte militaire au pouvoir l’enverra en prison à maintes Fela-Kalakuta Republic (11)reprises, le battra à la limite de la mort et commettra des raids policiers musclés et des exactions. Mais le 18 Février 1977 est considéré comme le paroxysme.

Les éléments déclencheurs de la furie de la junte militaire du Général Obasanjo sont l’album Zombie de 1976 dans lequel Fela cite ouvertement le chef de l’Etat nigérian, le traitant de voleur. Peu après, en Janvier 1977 le festival des Arts Nègres se tient dans la capitale, Lagos. Non seulement Fela boycotte le meeting, mais il donne une série de concerts gratuits, attirant sur lui l’attention des musiciens et des journalistes de la presse mondiale qui lui consacrent des articles et des reportages élogieux. Ulcéré, le conseil militaire prend la décision suivante : museler cet agitateur qui se moque du pouvoir dans des satires chantées à moitié en pidgin english et en yoruba et portées aux nues par le peuple qui soutient le chanteur.

Ainsi le 18 Février 1977, un régiment composé de 1000 soldats prend d’assaut la République de Kalakuta (quartier général de Fela depuis 1972 situé à Ikeja, dans la banlieue de Lagos). La charge est particulièrement féroce, Kuti est roué de coups, des femmes sont brutalisées et violées, et la mère du chanteur, Fumilayo Anikulapo Kuti (ministre du travail en 1960, luttant pour le droit de vote des femmes au Nigéria et amie du Docteur Kwane Nkrumah, le père de l’indépendance du Ghana) est défenestrée. Elle est âgée de 77 ans à ce moment. Détail sordide, le commandant défèque sur la pauvre femme souffrant de multiples contusions (elle décèdera 9 mois plus tard des suites de ses blessures.)

Kalakuta est pillée et détruite par le feu, le studio de Fela et son club le Shrine sont également détruits. Peu de temps après, Kuti entame une action en justice qui bénéficiera d’un non lieu (les responsables sont considérés comme « inconnus au bataillon »). En réponse à l’assaut et au verdict du procès, Fela ira porter personnellement le cercueil de sa mère devant la résidence du Général Obasanjo, considéré comme le meurtrier de sa mère.

Suite à ces évènements terribles, Fela publiera 3 albums enragés (Sorrow Tears and Blood, Unknow Soldier  et Coffin for Head Of State, respectivement sortis en 1977, 1979 et 1981). Mais harcelé par la police et l’armée, Fela se voit contraint de s’exiler au Ghana avant d’en être expulsé en 1978 pour avoir soutenu une manifestation étudiante. Il retournera dans son pays d’origine et épousera les 27 femmes de sa formation musicale et participera au festival Jazz de Berlin. Sa popularité grandira au fur et à mesure dans le monde entier à ce moment là, et Fela deviendra un porte parole des opprimés, tout comme Bob Marley et continuera son combat, jusqu’à sa disparition le 2 Aout 1997, emporté par le SIDA.

 


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